b.       Le travail thérapeutique

Les prises en charge sont individuelles ou en groupe. Elles font idéalement l’objet de rendez-vous réguliers afin d’optimiser l’impact thérapeutique de l’hippothérapie sur les bénéficiaires

Les objectifs de travail sont définis avec le·la bénéficiaire en priorité, et en coordination avec l’équipe éducationnelle et thérapeutique du Centre référent. Toutefois, la base de travail reste les besoins exprimés par le·la bénéficiaire venant en séance, lorsqu’il·elle est en capacité de l’exprimer.

La spécificité de notre pratique personnelle nous amène à pratiquer une hippothérapie principalement centrée sur du sensori-relationnel et la thérapie avec le cheval.

Dans la première approche, le·la bénéficiaire peut (ré-)expérimenter, parfois pour la première fois, des sensations corporelles qui lui permettent de reprendre contact avec sa corporalité, une corporalité changeante au fur et à mesure de nos âges et de nos expériences. La capacité du cheval de pouvoir nous porter, au sens premier et symbolique, prend ici bien évidemment tout son sens. La fonction de portage du cheval permet au bénéficiaire de se sentir en lien, de pouvoir s’abandonner au mouvement berçant et à la chaleur de l’animal. Il·elle expérimente également le lâcher-prise et accepte qu’un autre le mène ou veille à sa sécurité. Par ses expériences corporelles fortes, des émotions peuvent surgir, cueillies par le thérapeute qui en fait un matériau de travail.

De même, d’un point de vue relationnel, chaque cheval présentant sa propre personnalité l’offre par sa simple présence, au sein du groupe, au bénéficiaire venant en séance. Il est toujours troublant de constater les « alliances » qui s’opèrent dans ces rencontres, les choix opérés par les bénéficiaires et qui ne varient qu’à la marge, suite à un évènement suffisamment important pour provoquer la rupture.

Le plus souvent, leurs difficultés transparaissent par leurs rapports aux chevaux. Pour certains la séance a en grande partie pour objet d’apprendre à gérer la rupture, l’au-revoir. Pour d’autres, tout le relationnel se symbolise par le travail avec la corde et comment se faire comprendre corporellement d’un animal de 500 kg. La corde devient alors lien symbolique et média entre le·la bénéficiaire et le cheval-partenaire pour trouver sa juste place, en rencontrant l’Autre-cheval dans son mode communicationnel corporel.

Le travail au milieu du groupe de chevaux permet également au bénéficiaire d’exprimer librement, par associations et effets « miroirs », des situations vécues en famille, au sein de son groupe de vie ou tout autre groupe social. Le groupe de chevaux et le corps du bénéficiaire en immersion dans ce groupe révèlent les schémas relationnels, éducatifs, psychiques imprégnés chez le·la bénéficiaire.

Par son écoute tonico-émotionnelle, la sécurisation et le cadre établi, la fiabilité de sa présence à chaque rendez-vous, la présence du thérapeute peut amener une libération de la parole suite à des évènements survenus au sein du groupe de chevaux, une émotion apparue qu’il va nous falloir aider à décrypter avec bienveillance et délicatesse.

Là est tout l’enjeu de la thérapie avec le cheval. Ce qui vient différencier cette prise en charge par rapport à la sensori-relationnelle est la demande : nous nous trouvons ici face à une demande thérapeutique, alliant le partenaire cheval dans cette démarche. Avec des personnes vivant en institutions (H.P., SRJ/A, etc.), il est rare qu’une telle demande émane directement du bénéficiaire lui·elle-même. Cela se fait principalement lors des réunions interdisciplinaires, directement via son Titulaire ou par un représentant de l’Institution. Par contre, en se basant sur la demande du bénéficiaire de passer un bon moment avec les chevaux, d’apprendre à mieux les connaître, etc. (ce qui relève du sensori-relationel), nous pouvons plus aisément parvenir à rencontrer la demande thérapeutique, si tel est le cas.

D’une « simple » manipulation d’un cheval avec une corde, nous pouvons travailler sur le langage corporel, la juste place, la « bulle » et l’espace projectif virtuel dont une personne vivant en institution a besoin, en évitant par exemple des passages à l’acte violents pour le conquérir, i.e. le respect de l’autre et de soi-même.

La présence du cheval amène un rapport à la temporalité différente et les bénéficiaires prennent le temps de se poser, de se reposer : rien n’étant attendu d’eux, ils·elles sont libres de faire ou de ne pas faire, sans jugement.

Un autre aspect abordé lors des séances est l’expérimentation du champ des possibles et le développement de leurs compétences. Nous partons systématiquement de leur demande ponctuelle pour élaborer une séance, leur permettant de mettre en œuvre des compétences acquises et, sur base de ces compétences, leur permettant de développer, progressivement, de nouvelles compétences. Le point d’attention est bien évidemment de mettre en place des situations suffisamment complexes avec le cheval et son humeur du moment, pour qu’ils·elles doivent développer de nouveaux savoirs, mais leur laissant la possibilité d’atteindre l’objectif pour renforcer leur confiance en eux et leur estime.

Par ailleurs, l’attitude de jeunes en charge des chevaux évolue : ils deviennent plus sûrs d’eux, tout en exposant leurs difficultés face aux chevaux plus aisément. Nous pouvons ainsi utiliser ces évènements comme matériau relationnel lors de nos séances thérapeutiques.